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En 1945, Gaston Teillaud (1902-1980), expatrié à Chicago, enregistre une longue lettre audio
sur des disques pour les envoyer à sa famille en France.

Les meilleurs fragments (9 minutes) en Podcast sur ARTE RADIO
"CHICAGO LOVE" de MARIE SUREL

Gaston Teillaud : une lettre parlée à ma bien chère maman et à tous
[ avec quelques aimables mots de la part de Charlotte Teillaud - le tout sur 3 disques 78 tours 30 cm à prise directe ]

Pour écouter l'ensemble des 6 faces (mp3, total 35 minutes) c'est ici
Vous pouvez également charger chaque face
séparément et suivre le texte affiché.
Chaque photo peut être agrandie. Bonne écoute !


Samedi 8 septembre 1945

Une lettre parlée à ma bien chère maman et à tous,
par Gaston - 500 Diversey Prwy - Chicago, IL.

 

Envoi de Gaston Quentin Teillaud
17-N-State St. Rm 1308
Chicago 2 ILL. USA
aux bons soins de M. et Mme. BERGOT
à remettre à Mme. Eugénie TEILLAUD
33 rue du Roi de Sicile Paris 4ème - FRANCE

Télécharger Face 1 (mp3) :

- " Aujourd'hui, huit, samedi huit septembre 1945. Ici station mondiale Deversey, sous la direction du directeur de la partie musicale sans instrument, Gaston. Comme toujours, fidèle à sa belle tradition et glorieux passé, notre station de T.S.F. demeure unique en son genre, et comme les haricots verts, c'est toujours garanti sans fil.
Il sera exactement huit heures du matin, quand la cloche, surnomée le Bourdon de la Tour, résonnera. Mesdames, messieurs, encore onze secondes, et les vibrations puissantes et majestueuses vous parviendront...
Ah! Mesdames, messieurs, la direction s'excuse de cet incident mais, au lieu du grand bourdon, nous sonnerons ce matin, le petit bourdon, le tout petit bourdon, le tout petit petit bourdon. Maintenant, mesdames messieurs, écoutez... chhhut !
[ " Ding " ]
Vous avez entendu le tout petit bourdon.
Donc aujourd'hui, la station mondiale Deversey, sous la direction du directeur de la partie musicale sans instrument, Gaston, offre à son auditoire élégant la prime heure de l'année : un message venant directement d'Amérique. De Chicago, United States of America."

[musique]


" Mes bien chers tous,
Grâce à mes chers amis, Monsieur et Madame Bergot, j'ai le plaisir de vous faire, de vous faire parvenir quelques mots, de Chicago. Je voudrais à mon tour être de retour à Paname. Mais il me faudra encore attendre je crois jusqu'au printemps prochain, car les visiteurs comme les gars comme Gaston, de [ 2 ou 3 syllabes ici ], enfin tous les français de la colonie qui demeurent restés en Amérique, ne sont pas encore autorisés à visiter l'Europe, pour la simple raison que les conditions élémentaires en France sont trop mauvaises.
Il y a deux semaines, quand le général de Gaulle était à Chicago, j'ai eu l'occasion, je veux dire l'honneur de causer, au général Juin.
Après avoir reçu une lettre de mon oncle de Marseille, je lui, je lui en cause, enfin nous échangions quelques mots, et il me certifia que les conditions à Marseille, dans le sud de la France en général, étaient excessivement mauvaises. Il me dit : cependant à Paris les conditions s'améliorent, elles sont loin d'être normales, mais elles sont préférables à celles du sud de la France.
Donc tout ensemble, les conditions en France ne sont pas agréables. D'après vos lettres, quoique vous ne vous plaigniez pas beaucoup, on peut toujours à lire, on peut arriver à lire entre les lignes, et à constater que la guerre a laissé des conditions très pénibles en France.
Je vous ai envoyé depuis le mois de juin sept colis de onze livres. J'attendais des nouvelles, enfin pour savoir si vous les aviez reçus. N'ayant aucune nouvelle, j'ai attendu. Aujourd'hui je vous envoie encore deux autres paquets, espérant que tous vous arriveront. Si j'étais persuadé que ces paquets vous arrivent, je vous en enverrais plus souvent. Mais à part ceux de quatre [...] livres, je ne sais pas encore si les derniers vous sont arrivés, ceux de onze livres. Je vais tourner mon disque de l'autre côté."

Face 2 :

" Je reprends donc ma lettre. Au sujet des colis, il me reste encore, let's see : quatre et trois sept, j'ai encore sept colis prêts à partir, au magasin. Euh tous mes colis, tous les colis que je vous envoie sont numérotés à partir du numéro un. Ceux que je vous ai envoyés sont numérotés un deux trois quatre cinq six sept. Ceux que je vous envoie aujourd'hui sont numérotés huit et neuf, et ainsi de suite. Donc aussitôt que vous recevez un colis de onze livres, laissez le moi savoir. Laissez moi savoir également si... si vous constatez que des parties, qu'une partie ou une autre du colis a été volée.

Ah ! maintenant pour changer un petit peu : ici à Chicago, la température est très élevée. Il fait chaud autrement dit. L'humidité est écrasante. Ce matin, ils annonçaient à la radio, 91 pour cent d'humidité. Encore neuf pour cent et on peut commencer à nager ! La chaleur dans les appartements est intenable, tout au moins pour moi, moi qui n'aime pas la chaleur, je suis très mal placé. Hier soir il y avait encore 31 degrés centigrade, devant la fenêtre, et je peux dire au soleil, hier soir. Ce matin, je regardais le thermomètre, et il y avait encore 31 degrés.
Certainement que dans le milieu de la journée, il fait beaucoup plus chaud, la température doit monter à 34, 35, 36, 37, 38. Hier, au thermomètre américain, il y avait 92 degrés, de chaleur, plus l'humidité. Autrement dire on ne sèche pas, on est toujours mouillé, moi tout au moins je suis toujours mouillé. En plus de ça, je ne tiens pas à me plaindre, c'est pas la question, mais si vous ne reconnaissez pas ma voix aujourd'hui, vous pouvez l'attribuer à la fièvre des foins. La fièvre des foins est une allergie. C'est-à-dire que la personne, l'individu qui est atteint de cette, de cette faiblesse, eh bien! se mouche sans arrêt, éternue très souvent, ses yeux sont rouges, brûlent, et pleurent constamment : c'est tout ce qu'il y a de plus ennuyeux.
En plus de ça, pour mon cas c'est la poitrine qui me fait mal, ma p'tite poitrine. La poitrine, j'suis toujours en train de, hum, tousser, toujours très mal, et c'est toutes les années la même chose : depuis la dernière semaine du mois d'août jusqu'au premier, jusqu'aux premières gelées. Je me mouche, j'éternue, je pleure, je tousse. Alors ça influence la voix énormément. Je parle comme si j'avais, hum, comme si j'avais un rhume de cerveau...

Ma femme voudrait bien dire quelques mots, mais elle se plaint de ne peas savoir suffisament le français, elle dit qu'elle ne veut même pas dire un mot.
- Charlotte ! j'vais l'appeler voir : Charlotte!
[il s'éloigne, puis revient]
No, she is very bashful I mean, euuh en français elle est très timide, sur ce rapport; ne connaissant pas le français, elle fait quelques mots, quelques paroles, elle ne veut pas les dire parce qu'elle a peur de faire des erreurs. Donc elle se renferme dans un silence abstenu. Voilà, ça c'est la femme, hum...

Euh ! quelles sont les nouvelles encore ici à Chicago, eh bien ma foi comme je vous le disais dernièrement, enfin il y a quelques instants, le général de Gaulle était de passage à Chicago, avec son état-major, le général Juin et puis, le... comment, c'est un lieutenant-colonel qui est son aide de camp, donc toute la colonie française a été voir le général de Gaulle, à l'hôtel Blackstone, il a été très charmant, il nous a causé... très, comment dirais-je, très très très très gentiment c'est pas le mot, mais enfin, nous l'aimons bien. Il nous a également serré la main comme à de vieux copains. Tout s'est bien passé ce jour-là. Il y avait eu beaucoup de français dans les alentours et à l'hôtel, et le général de Gaulle et puis son aide de camp et le général Juin, ont eu une très grande ovation. Il y avait une parade aussi à Chicago dans la rue principale, et les trottoirs étaient complètement noirs [de] la foule [...] de Chicago. "

Face 3 :

" Le numéro trois de ma lettre...
Il est maintenant neuf heures moins le quart du matin. Je vais bientôt arrêter, et partir à mon travail. Auparavant, hum, sur moi-même je n'ai pas grand chose à dire; sur ma femme, non plus; Marcel est toujours en Floride, sa santé... s'est bien améliorée, aussi bien dire qu'il va très bien. Il travaille, il vit toujours comme un bon français : il mange bien, il dort bien, il aime bien ! C'est complet quoi ! Le climat là-bas lui plaît beaucoup : il fait chaud, mais la chaleur est plus sèche qu'à Chicago, excepté que la saison des pluies. Le restant de l'année est toujours beaucoup plus plaisant.

Il y a des palmiers, de gros oiseaux qui chantent, de la verdure, des fleurs et un soleil radieux, et, tout à côté de son travail il a la mer. Alors entre-temps il va prendre un petit bain de soleil, un petit bain dans la mer, se chauffer les côtelettes sur le sable... sur le sable d'or... enfin c'est un pays idéal.
A Chicago nous n'avons pas ça : c'est toujours la poussière, la suie, le trafic des voitures, la fumée, la chaleur... qui est très pénible, et l'hiver, un froid très pénétrant. Et il fait froid. Ma santé va bien, mon estomac ne me dérange plus maintenant, mon travail, très bien je travaille toujours, le soir je donne des leçons de maquillage dans une école de beauté : dans une école de charme ! La journée, je vends mes cosmetics, et puis entre-temps je m'amuse à faire des gadgets, Monsieur Bergot, certainement vous en touchera deux mots, car lui-même, m'a aidé au début, à me faire des ressorts en métal; je suis en train de faire un porte-clés automatique. J'en avais fait deux modèles : le premier était tout-à-fait rudimentaire, tout-à-fait... ah c'était un modèle, une esquisse, très rude. Le deuxième était déjà beaucoup plus élégant, et marchait beaucoup mieux. J'ai été voir un avocat, et il est en train de faire faire des recherches à Washington. Pour la suite nous verrons...
J'ai aussi un niveau d'eau, ce qu'on appelle un niveau d'eau, Pierre doit certainement savoir ce que je veux dire. Ce niveau d'eau, non seulement marque, euh montre l'horizontale, la verticale, l'oblique, mais montre également tous les degrés d'inclinaison, c'est dire 360 degrés. Je l'ai également donné à mon avocat, et il fait des recherches. J'espère toujours arriver à quelque chose avec un truc ou un autre quoi ! ...
Hum !
Voyons voir si je suis encore en voix je pourrais peut-être vous chanter une petite chanson, comme dans l'ancien temps. Je ne suis pas très en voix, autant vous le dire tout de suite. Maman se rappelle très bien la chanson du vin champenois : une française me l'a donnée et... je l'ai en mains, et je vais vous la chanter. Le temps est un peu court sur ce disque là faudrait que je finisse sur l'autre côté. Enfin allons-y :

Si ... ? ... l'or vert
Ô vin de Beaune ou de Tonerre
Moi j'adore les brillants rubis
De la Champagne où je naquis
Quand j'aperçois ces perles blondes
Ainsi que dans un carnaval
Je vois à travers le cristal
Passer les femmes de deux mondes

Alors je dis :
Ô vin joyeux, glou glou glou glou
Nectar mousseux, glou glou glou glou
Liqueur de flammes
Vin de la femme
Du champenois, glou glou glou glou
Quand je te bois, glou glou glou glou
Vin sans pareil
Je ... ?... soleil. "

Face 4 :

" Deuxième couplet... je vais prendre un peu plus bas.

J'ai des vins brûlés de l'Espagne
Ou des bières de l'Allemagne
Leur vin nous grise lourdement
Leur bière nous glace le sang,
Le vin qui chez nous prend naissance
Rend les coeurs aimants et joyeux
Et les vins les plus généreux de tous les vins
Sont ceux de France
Aussi je dis
Ô vin joyeux, glou glou glou glou
Nectar mousseux, glou glou glou glou
Ô Germanie, sombre patrie
Quoiqu'ils soient grands, glou glou glou glou
Tes régiments, glou glou glou glou
Ce vin français, non, non
Tu ne l'auras jamais.

...

Et ensuite je vais vous chanter Les Cloches, tu veux pas Jean-Pierre, une vieille chanson, tu te rapelles au phonographe maman?

Le sonneur du beffroi Jean-Pierre
Solitaire gravit au sommet
Là-haut parmi les vieilles pierres
Qui gardent si bien leurs secrets.

Mais les cloches sont ses compagnes
Et le soir quand vient Margoton
Eveillant l'écho des montagnes
S'envole un joyeux carillon.

Ecoutez-donc les vieilles cloches
Chanter l'heure du rendez-vous.
Voici Margoton qui s'approche,
Leur murmure est encore plus doux.

Ecoutez, les échos répondent,
Et du haut de la vieille tour
S'envole une chanson d'amour
Les cloches chantent.

Un soir Margoton l'infidèle
A Jean-Pierre fit ses adieux
Elle allait, horrible nouvelle
Epouser un autre amoureux.

[ici on entend un oiseau chanter]

Et torturé jusqu'aux entrailles
Jean-Pierre le carillonneur,
Dut sonner pour leurs épousailles
Hurlant de rage et de douleur.

Ecoutez les vieilles cloches
Qui sonnent des carillons fous
Pour l'infidèle au coeur de roche
Pour Margoton et son époux.

Ecoutez, les échos répondent
Et Jean-Pierre le délaissé
Frappa le bronze à le briser
Les cloches grondent.

Elles ont toutes des blessures
Les cloches du carillonneur
Mais plus cruelles sont les blessures
Que Jean-Pierre porte en son coeur.

Pour mettre fin à son supplice
Hanté par le passé maudit
A l'heure où sonne l'office
Jean-Pierre au battant se pendit.

Ecoutez donc les vieilles cloches
Comme un carillon écroulé
De Jean-Pierre c'est la caboche
Qui frappe le bronze peiné.

Elles sonnent sa dernière heure
Et jetant encore aux échos
Un dernier râle de sanglots,
Les cloches pleurent.

Et c'est tout pour les chansons. Le disque s'étire à sa fin; il ne me reste plus qu'à vous embrasser tous bien fort, à vous souhaiter [une bonne] santé, et je vous enverrai tous les paquets, mais laissez-moi savoir ceux qui vous arrivent. Beaucoup de paquets, beaucoup de vêtements.

Au revoir, bons baisers à tous! Merci Bergot ... Pour toi Maman. Pour toi, Nénette, pour tous ; au revoir. "

Face 5 :
[Il s'agit de bouts d'essais]

" Aujourd'hui, huit, samedi huit septembre 1945. Ici station mondiale Deversey, sous la direction du directeur de la partie musicale sans instrument, Gaston.
Comme toujours, fidèle à sa belle tradition et glorieux passé, notre station de T.S.F. demeure unique en son genre, et comme les haricots verts, elle est toujours garanti sans fil.
Ah! Ah! Ah! Ah!
[ici on entend bien les oiseaux]
Il sera exactement huit heures du matin, quand la cloche, surnomée le gros bourdon de la tour, résonnera.

- Ahhh!

[ coupure...]

[ Andrews sisters ]
Mesdames, messieurs, nous regrettons ce petit incident, une chose inespérée nous est arrivée: figurez-vous que je viens de recevoir Monsieur le boucher. Il nous apporte un beefsteak, et ma femme n'a pas pu tenir le coup : trop d'émotion. Enfin nous regrettons ce petit incident, et nous continuons avec le programme. D'ailleurs ma femme qui est à présent ici va vous dire quelques mots dans un petit instant.
[ Andrew Sisters, le volume augmente ]
Ceci est notre nouveau programme de musique américaine

[ il siffle et fredonne en même temps ... suivent 20 secondes de silence, car le volume a accidentellement été ramené à zéro; puis Charlotte en anglais : ]

- I...... get at all and I could sing for you in French but if I ever get to France I'll try to do my best rendation of the Marseillaise, which I have then known to do very well. We are I think glad to know that you're all together and it's then a marvelous relief to hear from you because we were very much worried, and I hope you're getting the packages we're sending, we're sending them, as many as we think we can, and if there's anything that you want and that we haven't sent, please write and tell us.

- Hum, just a second. Vous n'avez pas entendu le début de sa causerie, parce que ma foi l'appareil n'était pas réglé pour ça. You see I didn't .. the recording machine when you started to talk. So you have to start from the very begining (rires). Elle va recommencer dès le début, euh dès le début,

- I forgot what I said to start with. I just said Hi! I wish I could talk to you in French, and well ... I can't but I'm thinking about you ... I hope I meet you some day.

- That's very good. Très bien. Hum. Oui ma machine n'avait pas été réglée pour causer dans le microphone. Alors pendant quelques secondes ma foi, c'était le silence absolu, vous n'avez pas entendu sa voix. Au fait aujourd'hui c'est dimanche, le dimanche 9 septembre, hum, j'avais arrêté ce petit, ce disque au début, et je l'ai remis aujourd'hui. Euh, contrairement au projet de Bergot, qui devait repartir aujourd'hui, son départ a été retardé, et ne part, ils ne partent que mardi. De là , hum, la raison que je fais encore ce, ce record aujourd'hui. Je dois aller le voir bientôt, vers 9 heures j'dois le, le rencontrer chez des amis dans le, dans le nord; et je lui porterai ce record. Je tourne le record de l'autre côté maintenant. Je vais vous jouer un peu de musique américaine hein? Pour changer. "

Face 6 :

[Andrews sisters]

" Et nous continuons avec la musique américaine, et la petite causerie à la famille.
[ il siffle et fredonne, sa femme aussi semble-t-il ]

- Faisons un tour sur la radio voir ce qu'ils disent un peu partout, en vitesse :
[musique : " ... radio readers digest"],
- station WAGM, [ chant lyrique ], station WOBQ ... et les nouvelles en anglais, ça c'est une chanson d'église, qui va sortir.
Excusez-moi je suis toujours en train de renifler, et de me moucher, de graillonner, j'ai la fièvre des foins, et ça me dérange beaucoup aujourd'hui. C'est pas rigolo. Dites-donc alors au fait euh, des nouvelles : je devais toujours entendre, euh, recevoir une lettre de Lucien que je n'ai pas encore reçu. Comment va-t-il?

Et comment va Monsieur Poisson? Je n'ai aucune nouvelle de lui non plus. J'ai reçu les lettres de Pierre, et j'ai également reçu les photographies de Bernard et de Nénette. Et je n'ai, je n'en ai aucune à vous envoyer de nous. Mon appareil de photographie a été volé, m'a été volé, et je n'ai fait aucune photographie depuis, car d'abord les pellicules sont en dehors de, du public, les appareils photographiques, on ne peut pas y toucher, ils sont excessivement chers, parce qu'ils sont très rares, donc je n'ai aucune photographie à vous envoyer mais dès que je le peux je le ferai. D'abord je ne suis pas très beau, je perds, j'ai perdu mes cheveux encore davantage, j'ai presque une petite boule bien ronde, et puis encore quoi je commence à avoir quelques, quelques lignes, à gauche et à droite, mes cheveux grisonnent sur les tempes, mais j'ai toujours gardé ma belle forme, mes muscles ... Ooh! Charlotte has something to say, Charlotte veut vous dire quelque chose en Français :

- What can I say, I can say : nous voulons la photographie de tous la famille.
- Plus fort
- Plus fort?
- oui plus fort, tell us !
- Nous voulons la photographie de tous la famille.
- Très bien !
- What did I say ?
- You want the photography de toute la euh, the whole family. [rires] Elle veut la photographie de toute la famille.
- Oh I said tous
- bien de tous, de tous, de toute, the whole family. That's very good, [rires], hum, c'est très bien.

J'ai du mal à lui faire dire quelques mots en français, parce qu'elle est, sur ce point là elle est très timide, elle a toujours peur de faire des erreurs, et puis de, qu'on se moque d'elle.
Eh bien aujourd'hui comme j'étais très fatigué, c'est à cause de ma fièvre des foins c'est [....?], je devais aller en ville, je devais faire beaucoup de travail aujourd'hui et puis je n'ai rien fait, je suis resté à la maison, tous les deux, et qu'est-ce que j'ai fait, j'ai lu un peu et ma foi j'ai dormi la moitié du temps. J'étais mal fichu mon nez coulait (snif!) ah! excusez moi, c'est pas aujourd'hui que je pourrai chanter. Hum. Euh, quelles sont encore les nouvelles? Si, attendez voir, je vous enverrai des disques, si vous avez des moyens, un moyen de les jouer, de les faire jouer quelque part, écrivez-le moi et je vous en enverrai davantage. C'est toujours plus agréable d'entendre la voix des siens. Je voudrais bien que vous puissiez en faire autant également, mais ce n'est pas facile. Ces disques là ne sont pas faciles à avoir, je me défends comme un diable dans un bénitier pour les avoir à un prix réduit. Et ils ne font que d'être euh, ils commencent, on commence à les refabriquer à nouveau mais pendant la guerre, c'était très difficile à avoir. Cependant j'ai pu en avoir d'autres de différents genres et j'ai fait des recueils de la voix de Roosevelt, de Churchill, de beaucoup, de tous les évents, de tous les événements de la guerre passée. Enfin tout va bien, le disque tire à sa fin, donc [je vais bientôt l'] arrêter.

Donc mes bien chers tous, je vous embrasse tous bien fort, tous, Maman, Nénette, Pierre, Lucien, Madeleine, euh Henri, Mangeronès, Poisson, toute la famille, Mme Lapeyre, Mme la ptite oh, Mme Lapeyre la bonne concierge ! Allez [avec Charlotte] au revoir, toute la famille, c'est ça, au revoir à tous ! "

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[mise à jour 30 avril 2010] :

Quelques documents autour de Gaston Teillaud (1902 - 1980) et de son épouse Charlotte (1909 - 1988)

- Extrait de l'acte de naissance de Gaston Quentin Teillaud (source Archives départementales de la ville de Paris, 4e arrondissement):
Teillaud

L'an mil neuf cent deux, le vingt deux Décembre à trois heures. Acte de naissance de Gaston Quentin du sexe masculin né avant hier à deux heures du matin chez sa mère 57 rue de Rambuteau. Fils de père non dénommé et de Eugénie Teillaud âgée de vingt six ans, marchande aux Halles. Dressé par nous Jean Alfred Dardaine adjoint au maire du IVe arrondissement de Paris officier de l'état civil sur la déclaration de Louis Pauty trente un ans, fumiste 28 rue Julie, ayant assisté à l'accouchement, et en présence de Albert Bodin 15 rue Lecocq à Gentilly (Seine) et de Albert Bodin, trente sept ans, blanchisseur 8, rue Léon à Adamville (Seine), témoins qui ont signé avec le déclarant et nous après lecture
[signé] Pauty Bodin Bodin Dardaine
Par acte dressé en cette mairie le dix-huit Mars mil neuf cent trois Eugenie Teillaud a reconnu l'enfant inscrit ci-contre. Mention faite le vingt trois mars suivant.

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- Extrait du U.S. Social Security Death Index en ligne :

Gaston TEILLAUD - U.S. Social Security Death Index
Birth: 20 Dec 1902 State Where Number was Issued: Illinois
Death: May 1980
Social Security Number: 329-30-5227
State or Territory Where Number Was Issued: Illinois
Death Residence Localities :
Wheaton, Du Page, Illinois, 60187
Death Benefit Localities :
West Chicago, Du Page, Illinois, 60185

Charlotte P. TEILLAUD - U.S. Social Security Death Index
Birth: 4 Feb 1909 State Where Number was Issued: Illinois
Death: 8 Dec 1988
Social Security Number: 320-07-9598
State or Territory Where Number Was Issued: Illinois
Death Residence Localities :
Keene, Cheshire, New Hampshire, 03431
Roxbury, Cheshire, New Hampshire
Surry, Cheshire, New Hampshire

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- Extrait de l'acte de naissance de Marie-Antoinette [Nénette] (source Archives départementales de la ville de Paris, 4e arrondissement):
Teillaud
L'an mil neuf cent un, le douze septembre à deux heures et demi. Acte de reconnaissance de Marie Antoinette, née le dix sept et inscrite le dix-huit Juillet dernier en cette Mairie, comme fille de Eugénie teillaud et de père non dénommée. Dressé par nous, Louis Eugène Hamel, adjoint au Maire du quatrième arrondissement de Paris, officier de l'Etat Civil, sur la Déclaration faite par Eugénie Teillaud, âgée de vingt quatre ans, employée aux Halles, rue de Rambuteau, 57, qui reconnaît la susdite Marie Antoinette pour son enfant. En présence de Gustave Millot, âgé de tente ans , employé de chemin de fer, Boulevard de Reuilly, 19, et de Charles Hérard, âgé de quarante trois ans, gardien de la Paix rue des Ecouffes, 5, témoins qui ont signé avec la déclarante et nous après lecture.
[Signé] E. Teillaud; Millot; Hamel; Hérard
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Par acte dressé en cette Mairie le douze Septembre mil neuf cent un Eugénie Teillaud a reconnu pour sa fille l'enfant dénommée ci-contre.
L'an mil neuf cent un le dix huit juillet à dix heures acte de naissance de Marie Antoinette du sexe féminin née hier à trois heures du soir chez sa mère 57 rue de Rambuteau & à nous présentée, fille de père non dénommé et de Eugénie Teillaud, âgée de vingt quatre ans, employée. Dressé par nous Jean Alfred Dardaine, adjoint au Maire du quatrième arrondissement de Paris, officier de l'état civil sur la déclaration de : Marie Teillaud vingt sept ans, employée 195 boulevard Voltaire ayant assisté à l'accouchement & en présence de Jean Leblanc soixante trois ans journalier 17 rue des Partants & de Marie Thibault quarante huit ans nourrice à Nocé (Orne), témoins qui ont signé avec la déclarante & nous après lecture.
[signé] Marie Teillaud; Leblanc; Thibault; Dardaine
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Mariée à Paris 4e arrondissement le 15 janvier 1931 avec Pierre Robert Brillot. Paris le 23 mai 1931. Le greffier.
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Décédée à Draveil (Essonne) le 29 juillet 1991. Le 12.08.1991. Le fonctionnaire municipal délégué par le Maire.
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Les disques présentés ici ont été trouvés vers 1992 sur une brocante à Seine-Port, non loin de Draveil.


[mise à jour 11 février 2015] :

- On trouve dans la presse, quelques renseignements complémentaires sur Gaston Teillaud et son environnement professionnel dans les cosmétiques :
January 23, 1931
The Indianapolis News from Indianapolis, Indiana · Page 9 :
"Monsieur Gaston Teillaud Beautician, of Paris , Representing - the Famous MAISON CHASE"

September 11, 1935
Moberly Monitor-Index from Moberly, Missouri · Page 8 :
"Private Consultation With DOROTHY HARDWICK Expert Beautician From MAISON CHASE Get a scientific skin analysis instructions on corrective cosmetics and a facial make-up with poudre and rouge blended to match your own individual complexion."

March 29, 1931
Decatur Herald from Decatur, Illinois · Page 11 :
"... French Beautician Monsieur Durel...
... Dorothy Dean Cleansing Creme...
... LABORATOIRE MAISON CHASE A Big Hit In Big Stores Witness this scene in one of the great stores of Newark, N. J. Mons. Durel is demonstrating personally blended make-up with the products of this company...  Similar scenes are being enacted in other big city stores, including the following named: Grant's, New York City The Fair, Chicago Nugents, St Louis...
... Our laboratories manufacture for others under their labels, but we put our finest quality into our own products. We originated the personally blended make-up for exclusive individual use. It was necessary, as no two skins are alike. To do this we employed the services of the most experienced French chemists and beauticians, including Ms. Robare and Durel. This service was introduced with our products in the great stores of the country and has been perfected so you can Have it with our Dorothy Dean Toiletries

Daily Capital News and Post Tribune [Jefferson City, Missouri] : Sunday, March 29, 1931 - Page 5
... An Amazing Discovery No Two Complexions are So declares M Robare This Famous French beautician hat proved that skin pigment is neither pink nor white. To every single pink pigment there are Seven to ten brown tan and yellow pigments. The ordinary powder stamped fresh or Naturelle is not a natural shade. M Robare has created a special service for rouge eye shadpwa complete makeup blended for your individual complexion.  La Maison Chase Poudre is blended ram as many as twelve different basic shades Yourbeauty will be vastly enhanced the first time you use it You arc in reach of Paris New York Hollywood. For the first time Maison Chase Laboratories are producing at a popular price the famous beauty secrets of Paris. M Robare and staff are in complete charge. They are all serving a multitude of women by mail...

Sikeston Standard [Sikeston, Missouri] : Friday, February 17, 1933 - Page 6
... M. Edouard de Louvare and Hal M. Chase a member of Maison Chase...
... That is the opinion of Monsieur Robare de Louvare, dietician and beautician who has devoted his life to studying the relation of health to beauty. M. Louvare, who is representing Maison Chase, is in Sikeston to deliver two lectures Friday afternoon and evening at the I. 0. O.F. Hall.  "The European child from an early age is taught how to take care of his skin and his body”, said M. Robare. "He is taught how to preserve what nature has given him. A European man is not ashamed to care for his skin...


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